La signification éthique et existentielle du plaisir

R. MISRAHI (Paris)

RÉSUMÉ : La thérapeutique implique une connaissance de l'essence même du plaisir. On propose une description du vécu intérieur (description phénoménologique et existentielle). Le plaisir est à la fois jouissance intuitive et significations (de toutes sortes). Ce fait comporte des implications qui constitueront une anthropologie. Esquissons ces implications :

a) L'unité de la chair et de la conscience.

b) L'adhésion de la conscience aux contenus et aux significations délectables.

c) La possibilité constante de l'accès à la plénitude. L'essence du plaisir n'est pas le manque, celui-ci est un moment.

d) Le lien intrinsèque du plaisir et du désir.

e) Enfin, la réalité effective de la perfection comme achèvement et plénitude.

L'individu est source de son désir et de ses formes. La morale est ainsi dépassée, mais en même temps est révélée la signification éthique du plaisir. Il met en évidence le sens du désir et de l'existence humaine. Celle-ci est une recherche de la plénitude heureuse, qui se donne dans une expérience d'être. Le plaisir devient une métaphore de l'être. Le plaisir révèle en outre la structure spéculaire de la conscience et la valeur de la réciprocité. On peut enfin le saisir comme créateur : il est source d'invention et de liberté. L'éthique réfléchie n'est pas un hédonisme. Elle élève le plaisir au niveau de la joie. Les plaisirs sont des moments de la joie s'ils sont intégrés à la personnalité entière, c'est-à-dire à toutes les valeurs qui la fondent et à tous les aspects qui la constituent. La jouissance intégrale permet aux individus d'accéder ensemble au préférable et au réciproque. L'éthique du plaisir est ici un eudémonisme. Celui-ci suppose une certaine espèce de conversion réflexive. Un contresens est à éviter. La souffrance et l'angoisse existent mais ne sont pas constitutives du plaisir. Le lien entre souffrance et plaisir n'est affirmé que par une culture tragique et il découle d'une faiblesse et d'une paresse réflexives. Au contraire, la conversion réflexive et partagée permet de restaurer les sujets dans la plénitude de leurs pouvoirs et ouvre l'accès à une Joie qui est comme un être.




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